C’est à cette question que les professionnels d’Analyse Sécurité Sanitaire GS1 ont tenté de répondre lors de leur dernière université d’été qui a rassemblé une centaine de participants le 26 août 2011. Les nouvelles technologies peuvent en effet apporter de précieuses informations aux consommateurs et ainsi les rassurer sur les produits qu’ils achètent mais il s’agit d’une arme à double tranchant étant donné qu’internet peut également démolir la réputation d’une marque ou d’un produit en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire.
- Les entreprises agroalimentaires ont donc tout intérêt à surveiller ce qui se dit sur elles.
Par exemple, chez Nestlé, deux salariés sont chargés en partenariat avec un prestataire d’être les yeux et les oreilles du groupe sur la toile. Nathalie Bériot, directrice des affaires scientifiques et réglementaires de Nestlé France, explique : « le web a modifié la relation entre le consommateur et la marque. Si, avant, on pouvait se permettre d’attendre huit jours avant de répondre par écrit au courrier d’un client mécontent, avec Twitter, il faut maintenant réagir dans l’heure qui suit ».
La directrice a illustré son propos par une petite anecdote : un client dans un magasin Nespresso au Canada, mécontent de devoir attendre trop longtemps pour boire son expresso, avait envoyé un message sur Twitter (ou tweet) sur la page de la célèbre marque pour manifester sa colère. Aussitôt envoyé, le tweet a été pris en compte au siège de Nestlé en Suisse et le serveur du magasin a immédiatement été contacté par le siège. Il a alors reçu l’ordre d’aller s’excuser auprès du client et de lui servir un café gratuit. Ce dernier s’est alors aussitôt exécuté, mais s’est plaint auprès du client qu’il aurait pu perdre son travail à cause de son tweet… On pouvait alors lire peu de temps après sur internet que « chez Nespresso un avis négatif sur Twitter peut vous faire virer »… De quoi faire réfléchir !
Pour Nathalie Bériot, « la réponse de la marque doit toujours être graduée. Il faut réagir mais pas surréagir, car les effets peuvent être pernicieux. Selon la réponse que l’on apporte au consommateur, on crée de la valeur ou on détruit de la valeur ».
- Internet est aussi un outil précieux pour les professionnels dans le cadre de leur veille.
Philippe Imbert, directeur qualité chez Casino, en a présenté l’intérêt : « l’objectif d’une veille consiste à anticiper les dangers pour les éviter. Et Internet nous oblige à regarder un peu partout. Un risque allergique constaté sur un blog aux Etats-Unis peut devenir très vite un problème de santé nationale en France ». Chaque année, l’enseigne doit faire face à environ 500 alertes. Seul un peu moins de la moitié la concernent. « Sur les 234 alertes que nous avons reçues l’an dernier, dont 70% de type microbiologique, seules 2-3% étaient vraiment dangereuses », explique le directeur.
Les procédures de retrait, en revanche, ne peuvent pas encore passer uniquement par internet. Un coup de fil aux directeurs de magasin permet d’engager immédiatement la procédure.
- Enfin, les smartphones ont également leur rôle à jouer dans ce nouveau rapport à établir aux consommateurs.
En effet, par la simple lecture d’un code-barres avec ces nouveaux outils technologiques, un client peut découvrir la composition du produit qu’il vient d’acheter, son origine, ses conditions de production… Formidable me direz-vous ? Oui, si les informations indiquées sont de qualité. Or, c’est là que le bât blesse. « Aux Etats-Unis, près de 90% des données présentes sur des sites de renom tels que ShopSavvy ou Red Laser sont absentes ou fausses », selon René Le Caignec, PDG de AboutGoods, entreprise spécialisée dans les e-services. Ce type de défaillances s’explique en partie par l’utilisation du « page rank » (notoriété d’une page définie par un algorithme élaboré par Google) pour évaluer la fiabilité d’une page au détriment de sa source.
D’autre part, les marques rechignent à communiquer la composition exacte de leurs produits, ou bien l’origine de leurs matières premières, afin de préserver leurs « secrets ». GS1 a pour sa part lancé le projet « Proxi Produit » qui consiste à permettre aux consommateurs d’obtenir des informations vérifiées sur les produits dont ils scannent les codes-barres.
Doc Searls, de l’université de Harvard, a développé la théorie du Vendor Relationship Management (VRM), selon laquelle les consommateurs pourraient organiser leurs achats grâce à des logiciels en open source afin de choisir les meilleurs produits des meilleurs fournisseurs et aux meilleurs prix. Cette théorie redonne le pouvoir au consommateur, puisqu’il peut même déterminer seul le produit dont il a besoin et demander à la marque de lui fabriquer sur mesure. Le VRM s’oppose au Customer Relationship Management (CRM), qui voit d’un côté une marque ou une enseigne puissante et pourvue d’outils perfectionnés et de l’autre un consommateur captif et dénué de moyens. Selon Daniel Kaplan, délégué général de la Fondation Internet Nouvelle Génération (FING), le VRM ne doit pas être considéré comme une menace par les marques, mais bien au contraire un outil permettant de développer de nouvelles opportunités. Il a conclu en affirmant que « la confiance peut difficilement naître dans une relation asymétrique entre une organisation informée et outillée et un individu isolé, sans moyens ». Reste à savoir si les enseignes ou les marques accepteront de se convertir au VRM.