De mauvaises conditions climatiques à des moments clés de la production des fruits ont eu une incidence majeure sur les récoltes de plusieurs catégories de fruits destinés notamment à la fabrication de jus de fruits relate Unijus, l’Union nationale interprofessionnelle des jus de fruits.
Les difficultés d’approvisionnement de certaines matières premières et l’augmentation exceptionnelle de leurs prix soulèvent une véritable problématique pour le secteur.
Rappelons que dans la répartition des coûts de production des jus de fruits, le poids de la matière première représente entre 60 et 80% de ces coûts.
Les pommes et le raisin, premières victimes des perturbations climatiques en Europe
Les récoltes de pommes subissent les conséquences de mauvaises conditions météorologiques en Europe observées au printemps dernier (gels tardifs).
La WAPA (World Apple and Pear Association) a communiqué une baisse de 21% de la récolte totale, soit une production totale 2017 estimée à 9,3 millions de tonnes.
Pour la France, la WAPA estime cette diminution à 8%, avec de très grandes disparités selon les régions. Certains arboriculteurs français sont impactés à plus de 80% (Alsace, Savoie et Bourgogne). Sur le marché des pommes conventionnelles, les prix des purs jus ont déjà augmenté de 50% par rapport à l’année dernière, et ceux des concentrés ont doublé.
Une situation d‘autant plus délicate que la consommation de jus de pomme a tendance à augmenter. Signe que le contexte est exceptionnel et particulièrement difficile cette année : des annonces de dénonciations de contrats sont déjà observées sur certaines références, faute de produits disponibles. La pénurie se fait particulièrement sentir sur le marché des pommes Bio, les vergers allemands ayant été touchés de plein fouet par les gels d’avril.
La traditionnelle et forte demande allemande en jus de pommes Bio déstabilise l’ensemble du marché européen. Même situation catastrophique pour le raisin.
En effet, la récolte européenne devrait être bien plus faible que celle de l’année dernière (-16%) et que celle de ces 4 dernières années (-20%). On estime même déjà que ce sera la plus petite récolte depuis des décennies, les 3 plus gros pays producteurs (Espagne, France, Italie) étant touchés, ce qui constitue une situation inédite.
En cause, les fortes gelées d’avril, puis la sécheresse et enfin les limitations drastiques de l’usage de l’eau sur les régions méditerranéennes qui ont fortement influé sur la récolte. Les prix des matières premières flambent (+75% par rapport à l’année 2016). La disponibilité est très faible. Ceci est particulièrement vrai pour les fabricants de jus de raisin qui ne sont pas prioritaires sur ces matières, les producteurs de raisins privilégiant les débouchés viticoles.
Le pamplemousse, en situation de rupture
En effet, la production de pamplemousse rose n’a pas été à la hauteur de celle de l’année précédente, notamment en Afrique du Sud. Même constat alarmant en Floride, puisque depuis quelques années la production ne cesse de baisser. Ces difficultés ont eu pour conséquence de doubler le prix du jus de pamplemousse rose par rapport à l’an passé.
Afin d’enrayer le risque de rupture de matière première, tous les espoirs sont désormais tournés vers les récoltes israéliennes (chiffres disponibles mi-octobre) et les récoltes mexicaines (chiffres disponibles fin novembre). Mais à ce jour, sans aucune assurance…
L’orange, une production à la merci de l’ouragan Irma
L’orange, fruit le plus consommé sous forme de jus en France (47% des ventes, Nielsen 2016) et dont le marché est largement dominé par le Brésil, a connu une récolte 2016-2017 particulièrement basse (la plus faible depuis 1954).
Jusqu’il y a peu, les estimations des producteurs brésiliens d’oranges étaient encourageantes avec une hausse importante de la production sur l’année 2017-2018 : +50% par rapport à l’année dernière et +25% par rapport à l’année précédente d’après les calculs de l’USDA. Cela aurait dû aboutir à la reconstitution de leurs stocks, au moins de façon partielle.
Mais le passage de l’ouragan Irma en Floride vient contrarier ces prévisions : la perte des récoltes s’y élèverait à 50% voire 75% d’après des premières évaluations. Les USA auront donc à nouveau besoin cette année des jus d’orange du Brésil avec pour conséquence une nouvelle tension sur le marché. Les cours très élevés du jus d’orange depuis 2016 ne devraient donc finalement pas baisser en 2017-2018….
Une situation mieux contrôlée pour d’autres fruits
Si certaines productions de fruits se trouvent aujourd’hui dans des situations d’extrême tension, certaines catégories de fruits sont épargnées cette année. Après plusieurs années critiques, la production d’ananas a été relancée et la situation est désormais nettement apaisée, notamment grâce à une production normale au Costa Rica. Les récoltes d’abricots, de pêches, de poires ainsi que de fruits de la passion ont également été conformes aux attentes cette année.
Le climat, une question de survie pour l’ensemble du secteur
Force est de constater que la filière des jus de fruits, dans le prolongement de celle des fruits, est très tributaire des conditions climatiques.
Les amplitudes aussi bien sur les disponibilités matières premières que sur les prix constituent des contraintes de plus en plus fortes pour les maillons intermédiaires de la filière. Il devient plus que jamais crucial que l’ensemble des acteurs en tiennent compte et s’organisent autour de ces contraintes. « C’est une question de survie pour l’ensemble du secteur », conclut Unijus.