Deux tiers des importations françaises de tournesol proviennent d’Ukraine, principalement pour la fabrication d’huile et de tourteaux pour l’alimentation animale.
D’ici quinze jours environ, les réserves de tournesol seront épuisées en Europe, ont prévenu les industriels et autorités. En conséquence de la guerre en Ukraine, le tournesol qui entre dans la composition de nombreux aliments ne parvient plus, en France comme ailleurs. Frites, chips, sauces, biscuits, margarines, plats préparés, pesto, poisson pané, etc. : des milliers de produits sont concernés.
Selon l’association Foodwatch, «Les fabricants se tournent donc vers des ingrédients de substitution, comme l’huile de colza, l’huile de palme et les tourteaux de soja OGM en provenance d’Amérique latine. Et ils demandent des « dérogations » pour vendre ces produits revisités sans changer les étiquettes».
Foodwatch alerte sur le risque que la crise serve d’alibi à des reformulations en catimini. «Parce que les consommateurs doivent être informés de ces changements d’ingrédients, foodwatch lance une pétition exigeant la totale transparence de la part des fabricants et de la grande distribution pour tous les produits concernés sur les emballages, en ligne, mais aussi bien sûr dans les rayons», explique l’association.
«Les opérateurs en aval ont réagi rapidement en décidant de reformuler leurs recettes de produits afin de remplacer l’huile de tournesol. Dans le cas des huiles de friture, il y a eu des remplacements d’huile de tournesol par l’huile de palme, l’huile de soja et l’huile de colza», reconnaît FEDIOL, l’association européenne de l’industrie des huiles végétales et des farines protéiques.
Par ailleurs, les allégations «nourri sans OGM» sur les étiquettes pourraient être caduques puisqu’il va falloir remplacer les tourteaux de tournesol utilisés pour l’alimentation animale par des tourteaux de soja venant d’outre-Atlantique. Et ils seront très probablement génétiquement modifiés. Idem pour les mentions «sans huile de palme».
Voir les potentiels allergènes se glisser dans les nouvelles recettes
«Les fabricants sont d’ores et déjà en train de changer certaines recettes ailleurs en Europe. En France, ce n’est qu’une question de jours et la question reste posée de l’information des consommateurs. Il y a deux ans, en pleine crise de la Covid, les opérateurs avaient déjà reformulé leurs produits sans nous alerter. foodwatch avait alors exigé la transparence de la part des autorités et l’avait obtenue. Cette fois, nous mettons la pression sur les industriels pour qu’ils s’engagent à informer en temps réel et directement sur les produits des changements d’ingrédients, et qu’ils les expliquent. Car la crise ne doit servir d’alibi ni à des abus, ni à un défaut d’information des consommateurs», explique Camille Dorioz de foodwatch.
La DGCCRF et l’industrie agroalimentaire parlent de milliers de produits devant faire l’objet de dérogations. Celles-ci ont déjà été accordées aux industriels notamment en Italie, Finlande, Grande-Bretagne, aux Pays-Bas. En France, les concertations sont en cours.
L’huile de tournesol est omniprésente dans l’alimentation transformée, en tant que corps gras dans les frites, les chips, comme ingrédient dans les biscuits, sauces, poisson pané, margarines, plats pour bébés et même dans le pesto (qui contient rarement de l’huile d’olive), etc. Les changements d’ingrédients soulèvent la question de voir de potentiels allergènes se glisser dans les nouvelles recettes : les consommateurs doivent évidemment être prévenus sans délai.
«Nous demandons que tout changement soit communiqué sur les emballages directement, en rayons, sur les sites des marques, les réseaux sociaux et sur les sites de vente en ligne», conclut Camille Dorioz, responsable des campagnes chez foodwatch.