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L’optimisme semble être de nouveau de rigueur dans l’agroalimentaire pour 2014. Neuf chefs d’entreprise sur dix prévoient une hausse de leurs revenus et un tiers d’entre eux anticipe une augmentation de plus de 10 % de leurs ventes au cours des deux prochaines années, selon une étude réalisée par Grand Thornton au niveau mondial*.
Des coûts qui freinent la croissance de l’industrie agroalimentaire
Mais malgré cet enthousiasme, les obstacles seront encore nombreux en 2014. A commencer par le prix des matières premières. Selon Grand Thornton, ce poste de dépense représente 45 % du chiffre d’affaires des entreprises de l’agroalimentaire.
Globalement, plus de deux tiers des chefs d’entreprise s’attendent à voir leurs coûts augmenter dans les douze prochains mois. Leur hausse mine d’ailleurs le secteur entier de certains pays. En Belgique par exemple, malgré un chiffre d’affaire (+1,8 %) et des exportations en hausse, le prix de matières premières, de l’énergie et du travail a gonflé plus rapidement que le prix de vente des producteurs, d’après une étude du groupe Astradius. Une situation qui met en grande difficulté l’industrie agroalimentaire. Les faillites ont bondi de 9 % en Belgique en 2013, mais elles devraient se stabiliser cette année.
Un ralentissement de la demande domestique
Par ailleurs, la hausse du chômage a entraîné un ralentissement de la demande domestique dans de nombreux pays, surtout en Europe occidentale. Les Pays-Bas sont particulièrement touchés pour ce repli. La part de marché des services dans l’agroalimentaire y est par exemple en recul de 30 %, selon Astradius. Et si le chiffre d’affaires des supermarchés devrait augmenter de 2 % en 2014, c’est avant tout en raison d’une hausse des prix et non des volumes.
La France souffre elle aussi de l’affaiblissement de son marché intérieur. Malgré de nombreux atouts – chiffre d’affaires, volumes et exportations en hausse, produits réputés- les marges brutes ont reculé de 14,3 points depuis 2008, et le secteur de la viande, le plus important en France, est le premier touché par la crise. Il est largement concerné par les défaillances d’entreprises, qui devraient augmenter de 5 % dans les mois avenir dans l’agroalimentaire. Il faut néanmoins souligner que ces défaillances restent moins nombreuses dans l’agroalimentaire que dans d’autres secteurs.
Les exportations pallient la faiblesse du marché intérieur
Les pays performants dans le domaine des exportations font plus facilement face au fléchissement de la demande domestique. En Espagne notamment, malgré l’effondrement de l’économie, le secteur agroalimentaire s’est montré résilient, et ce, grâce au niveau des exportations, qui n’a cessé d’augmenter depuis le milieu des années 1990. En 2012, elles ont encore bondi de 9,4 % et cette tendance se poursuit. Le taux de chômage est ainsi deux fois moins important dans l’agroalimentaire que dans les autres secteurs.
De la même manière, l’agroalimentaire danois se porte plutôt bien. Le pays exporte deux tiers de sa production et jusqu’à 90 % des volumes de viandes produits. Les exportations devraient encore s’accroître avec la reprise de l’économie mondiale prévue pour 2014 , selon Astradius. Le Danemark a largement parié sur les pays émergents, notamment sur la Chine. Selon Grand Thornton, les dirigeants d’entreprises sont d’ailleurs 38 % à projeter d’exporter en Chine dans les deux ans à venir.
Pays émergents, pays d’avenir pour l’agroalimentaire
Contrairement aux pays comme la France, les pays émergents connaissent une forte expansion de leur marché domestique. Au Brésil, la consommation des ménages, bien que mois forte que prévue, reste soutenue ( +1,8 % en 2013). Les ventes continuent de croître, les volumes de légumes ont augmenté de 24 % sur les dix dernières années, faisant du Brésil le troisième producteur mondial. Les supermarchés se multiplient et les ventes au détail de produits alimentaires préemballés devraient prendre 26 % d’ici 2017.
De même, en Pologne, les ventes ne cessent d’augmenter et cette hausse massive devrait se poursuivre au moins jusqu’en 2017, grâce à une élévation des revenus polonais, estime Astradius. Le développement du secteur et sa « robustesse » ont déjà attiré de nombreux capitaux et investisseurs.
Miser sur les investissements
Les investissements s’avèrent indispensables pour développer, renforcer ou conquérir les marchés. C’est d’ailleurs ce qui fait défaut à la France, d’où une compétitivité moindre, selon le groupe d’assurance-crédit. L’Hexagone est a ainsi reculé à la cinquième place des exportateurs mondiaux l’an passé.
Au niveau mondial, environ 80 % des dirigeants d’entreprise ont l’intention d’augmenter leurs investissements au cours des prochains mois, selon Grand Thornton. Les sociétés les plus enclines à investir sont en Amérique du Nord. L’Europe arrive derrière l’Asie et l’Australie.
Les marchés à investir en 2014
Mais quels nouveaux marchés investir en 2014 ? Le e-commerce, en fort déploiement aux Pays-Bas par exemple, est en train de devenir incontournable. 78 % des responsables de l’agroalimentaire au niveau mondial considèrent les sites Internet comme l’une des principales méthodes pour attirer et fidéliser les consommateurs. De plus, selon Sprint Mobile Moment of Thruth Survey, 61 % de 15-35 ans et 58 % des 36-65 ans utilisent Internet pour faire leurs courses ou lorsqu’ils mangent à l’extérieur.
Autre secteur à investir : celui de l’alimentation saine ou bio. C’est en tout cas une recette garantie aux États-Unis. Entre 2012 et 2014, l’agriculture bio devrait y générer un taux de croissance composé annuel de 12 % et la production de fruits et légumes ne cessent d’augmenter au pays de la junk food.
Tendances et innovation de l’agroalimentaire
Autre tendance, qui se vérifie dans la plupart des pays, mais pas en France : le développement des marques de distributeurs. Alors que dans l’Hexagone, les marques propres viennent d’atteindre leur niveau le plus bas depuis 2008, aux Etats-Unis elles ont enregistré une croissance de 2,6 % par an depuis 2009. Dans le même temps, les grandes marques nationales n’ont augmenté que de 0,9 %, selon la Private Label Manufacturer Association.
Enfin, les dirigeants d’entreprises comptent améliorer la traçabilité de leurs produits. C’est en effet une attente grandissante des consommateurs, surtout depuis les récents scandales alimentaires. Actuellement 62 % des dirigeants affirment surveiller la traçabilité de leurs produits depuis le premier tiers de la chaîne d’approvisionnement au moins. En fait, « les niches d’hier sont les tendances d’aujourd’hui », explique Grand Thornton.
* L’étude de Grand Thornton a été réalisée via un questionnaire en ligne auprès d’un panel de 248 dirigeants au Canada, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni, en France, en Irlande, en Australie et en Nouvelle-Zélande entre mai et juillet 2013.