Sommaire
«Si la filière a pris les mesures drastiques pour assurer la reprise de la production dans les meilleures conditions, elle en appelle à l’achat citoyen pour la soutenir et lui permettre de contribuer à la souveraineté alimentaire française», commente l’interprofession volaille de chair, l’ANVOL, qui fait un point sur le marché de la volaille en France.
La consommation globale de la volaille du pays (domicile et hors domicile) en 2021, a renoué avec la croissance pré-covid et augmenté de +2,1% en volume. Chaque habitant en a consommé environ 28,5 kg sur l’année, essentiellement des poulets (76%). Une belle dynamique mise à mal par l’épisode d’influenza aviaire sans précédent qui a touché la filière avicole en ce début d’année. La France, 2e pays producteur de volailles de l’Union européenne en 2021, devrait ainsi passer à la 4e place avec une offre réduite de -9,7% en 2022.
En effet, au-delà de leur mobilisation pour redémarrer le secteur, les professionnels sont confrontés à deux défis de taille. Ils font face à une hausse des coûts de production inédite, qui atteint +45 à +50% en deux ans (2e trimestre 2022 vs 2e trimestre 2020) pour un poulet en sortie d’élevage, et ils sont menacés par la hausse des importations, qui touchent déjà 49% des poulets consommés sur les cinq premiers mois 2022.
La France, 1er pays consommateur de volailles de l’Union européenne en 2021
L’année 2021 a marqué le retour des tendances dynamiques de la période pré-Covid, avec une consommation globale de volailles en France qui a enregistré une hausse de +2,1% en 2021 vs 2020 (Source : Itavi d’après Eurostat, SSP, Mapama, Destatis, Istat).
Ainsi, la France est devenue le premier pays consommateur de viande de volaille de l’Union européenne (hors Royaume-Uni) avec 1,926 million de tonnes de volailles consommées, devant l’Allemagne (1,865 Mtéc) et l’Espagne (1,581 Mtéc). Chaque Français a ainsi consommé 28,5 kg de volaille en 2021, représentant environ 15 poulets sur une année. Sur dix ans, le taux de croissance moyen de la consommation s’établit à + 1,8%. La croissance de la consommation de poulet par habitant est très dynamique avec une croissance moyenne annuelle de 3,6% sur 10 ans.
Le poulet, moteur de la hausse de la consommation des volailles en France
À fin mai 2022, la consommation globale des volailles (hors domicile et à domicile) a augmenté de +0,9% en volume par rapport à la même période de 2021, tirée par la reprise des activités en restauration (Source : Itavi d’après, SSP, douanes et Kantar WP pour France Agrimer). «Un chiffre qui devrait baisser d’ici la fin de l’année en raison de la diminution de l’offre due à l’Influenza aviaire dont a été victime la filière cette année», explique l’ANVOL.
Les poulets constituent le moteur des ventes des 5 premiers mois de l’année 2022, avec une hausse en volume de +6,6% vs les 5 premiers mois de 2021. En revanche, la consommation des autres volailles est en recul : -15,6% pour les dindes, -22% pour les canards et -2,7% pour les pintades. En effet, l’influenza aviaire a réduit l’offre présente sur le marché : la production s’est notamment repliée de -12,7% sur la période pour les dindes et de -17,9% pour le canard alors que, dans le même temps, la production de poulets augmentait de +3%.
Les poulets sont les volailles les plus consommées en France et leur part progresse en 2022 en raison d’une offre réduite pour les autres espèces en raison de l’influenza aviaire. En 2021, ils représentaient plus des trois quarts des volailles consommées dans le pays (76,1%) et cette proportion est passée à 80% sur les 5 premiers mois de l’année 2022. (Source : Itavi d’après SSP – 2021). Les dindes arrivent en deuxième position (14,4% des volailles vendues en 2021 et 13,2% sur 5 mois 2022). Le canard occupe la 3e marche du podium (8,3% des volailles vendues en France en 2021 et 5,7% à mai 2022), devant la pintade (1,1% en 2021 et 0,9% à mai 2022) et les autres volailles, cailles et pigeons (0,6% et 0,1% en mai 2022).
«Pour la première fois, tous les types d’élevages ont été touchés par cette crise sanitaire historique, tant par sa violence que par sa durée, allant même jusqu’à menacer la diversité caractéristique de la filière française. Dès le début, tous les acteurs se sont massivement mobilisés pour préserver ce modèle unique au monde, qui se distingue par la diversité de ses espèces (poulets, dindes, pintades, canards, pigeons, cailles) et de ses modes d’élevages (standard, bio, Label Rouge). Aujourd’hui, ils sont en ordre de marche pour assurer une reprise de la production dans les meilleures conditions, avec des mesures adaptées», souligne l’ANVOL.
Un recul de production de près de 10% en prévision pour 2022
La France a totalisé 1 400 foyers d’Influenza Aviaire dont 860 en Pays de la Loire en 6 mois. Sur le terrain, tous les professionnels (éleveurs, organisations de production, fabricants d’aliments, abattoirs, couvoirs, entreprises de transformation) se sont mobilisés pour stopper la propagation du virus, en coordination avec les services de l’État et les vétérinaires. L’épizootie a entraîné la disparition de 20 millions de volailles, dont 12 millions de volailles de chair.
Entre abattages et vides sanitaires, la filière estime que la production de volailles françaises sera globalement en baisse de -9,7% en 2022 par rapport à 2021. Les canards à rôtir (-30,3%), les pintades (-18,6%) et les dindes (-17,7%) devraient être les plus touchés par ce repli. La production française de poulets ne devrait quant à elle reculer que de -3,3 % sur l’année.
La filière face à la poursuite de la hausse des coûts de production
Dans ce contexte de redémarrage progressif des mises en place dans les élevages, les professionnels doivent toujours faire face à la flambée de leurs coûts de production : le coût de l’alimentation se maintient à un niveau très élevé, les prix des poussins, de l’énergie, des emballages, et de la main-d’œuvre augmentent considérablement… L’indice ITAVI mesurant le coût de l’aliment a ainsi bondi de +80% entre août 2020 et août 2022 et toutes les autres charges voient leurs hausses s’accélérer. Le coût de l’énergie a ainsi augmenté de +17% au 1er trimestre 2022 par rapport au 1er trimestre 2020 puis de +30% au 2e trimestre et va poursuivre sa hausse dans les mois à venir. Au total, l’ANVOL estime que le coût de production d’un poulet vivant a augmenté de +45 à +50% sur le 2e trimestre 2022 par rapport au 2e trimestre 2020. Une flambée des coûts qui fragilise le modèle contractualisé de la filière.
Une hausse généralisée des coûts de production allant de +45% à 50% en deux ans
Depuis le début de l’année 2020, les éleveurs sont en effet confrontés à la hausse des cours des matières premières composant l’alimentation de leurs volailles. Une situation accentuée avec le début de la guerre en Ukraine. Cette flambée a une incidence très importante puisque l’alimentation représente de 60 à 65% du coût total de la production d’une volaille.
En deux ans, du mois d’août 2020 à août 2022, l’indice ITAVI mesurant le coût de l’aliment du poulet standard a ainsi bondi de +80 %. Malgré un léger fléchissement en août, l’indice se maintient ainsi à un niveau record.
Au-delà du coût de l’aliment, les éleveurs doivent également faire face à l’accélération de toutes leurs autres charges. L’augmentation des prix des poussins entrant dans leurs élevages est ainsi évaluée par l’ITAVI à +43% sur le 2e trimestre 2022 par rapport au 2e trimestre 2020.
De plus, au même titre que tous les autres secteurs, les professionnels de la filière des volailles de chair sont également confrontés à la hausse généralisée des coûts liés au transport, aux emballages ainsi qu’à l’énergie (+30 % au 2e trimestre 2022 vs 2e trimestre 2020), qui va continuer à augmenter fortement. Par ailleurs, la hausse des matériaux de construction handicape la rénovation et l’installation des poulaillers.
Le modèle de la contractualisation en danger
L’interprofession demande à l’ensemble des maillons de la filière de prendre en compte l’évolution de ces indicateurs et la hausse importante du coût de production. Il s’agit d’assurer la pérennité de l’activité des éleveurs de volailles, l’approvisionnement du marché et de préserver la diversité des volailles françaises. En effet, dans la filière volaille, un mécanisme de contractualisation, lie les producteurs et les transformateurs. Aussi, il est important que les hausses de coûts de production soient répercutées jusqu’au dernier maillon.
Plan de résilience : des aides adaptées pour l’aliment, mais difficiles d’accès pour l’énergie
L’Interprofession de la volaille de chair salue l’enveloppe de 400 millions d’euros débloquée pour les éleveurs dans le cadre du Plan de Résilience du Gouvernement et l’adaptation de l’« aide aliment » à la singularité de son fonctionnement par contractualisation. Les éleveurs de volaille ont en effet la particularité d’avoir leurs prix de vente de leurs animaux indexés sur le coût de l’aliment. De fait, le surcoût engendré par la hausse de l’alimentation n’est pas seulement supporté par les éleveurs. Il l’est tout autant par l’organisation de production, adossée au fabricant d’aliments ou à l’abattoir. En revanche, ANVOL déplore que l’aide concernant l’énergie soit trop difficilement accessible aux différents maillons de la filière.
La Volaille Française menacée par la recrudescence des importations
Autre hausse, les importations de poulets ont fortement augmenté ces 20 dernières années : elles n’étaient encore que de 25% en 2000. L’objectif de la filière est aujourd’hui d’offrir aux consommateurs français du poulet pour toutes les occasions de consommation et de rependre des parts de marché sur l’importation. Pour lutter contre les importations, l’Interprofession propose notamment l’application des clauses miroirs pour n’autoriser que les importations de volailles soumises à des réglementations identiques et non pas équivalentes à celles appliquées volailles françaises.
En parallèle de ces charges, la filière doit également affronter la menace grandissante des importations non soumises à la réglementation européenne et éloignées des bonnes pratiques des éleveurs français. Sur les 5 premiers mois de l’année 2022, 49% des poulets consommés en France ont ainsi été importés, contre 45% sur la même période en 2021. La hausse des importations est particulièrement marquée sur la viande de poulet en provenance du Brésil (+122 %) et d’Ukraine (+181 %). Les professionnels s’inquiètent ainsi de la décision prise par l’Union européenne de lever les restrictions liées aux importations ukrainiennes depuis juin. En effet, ils soulignent que les volailles ukrainiennes arrivant en France ne profitent pas aux éleveurs sur place, mais à un Groupe financier monopolistique intégré, coté à la Bourse de Londres et dont le siège social est situé à Chypre.
«Dans un contexte de hausse des importations et de levée des quotas ukrainiens, l’Interprofession des Volailles Françaises ne comprendrait pas la ratification de nouveaux accords commerciaux européens avec le Chili et les pays du Mercosur. L’enjeu est la souveraineté alimentaire de l’Europe et en particulier de la France. L’ouverture de nouveaux contingents reviendrait à mettre en concurrence des filières ne respectant pas les mêmes exigences sur les bonnes pratiques d’élevages», explique l’ANVOL.
La Commission européenne a en particulier émis son intention d’augmenter le quota des importations en provenance du Chili, qui pourraient ainsi passer de 18 000 tonnes importées aujourd’hui en Europe à 40 000 tonnes. La filière s’étonne que l’Union européenne soit ainsi prête à accorder des contingents supplémentaires à un pays qui, d’après un récent contrôle opéré par la Direction Générale de la santé et de la sécurité alimentaire de la Commission n’est pas exemplaire d’un point de vue sanitaire. C’est pourquoi le Gouvernement français doit maintenir sa position et ne pas ratifier cet accord.
L’achat-citoyen en soutien au redémarrage de la production française
Pour assurer la pérennité de leur modèle exemplaire et contribuer à la souveraineté alimentaire du pays, les acteurs de la filière appellent les consommateurs à soutenir le redémarrage de leurs activités sur le territoire en choisissant des produits estampillés « Volaille Française » garantissant leur origine en magasins comme en restauration. Depuis le 1er mars, un décret oblige en effet les professionnels de la Restauration Hors Domicile à indiquer l’origine française de toutes leurs viandes, y compris de la volaille. Cet étiquetage permet de valoriser le savoir-faire exemplaire des professionnels de la Volaille Française. Faire le choix de la Volaille Française, c’est soutenir les 100 000 professionnels de la filière, dont 34 000 dans les élevages, qui consacrent tous les jours sur le terrain du temps et de l’énergie pour fournir les meilleures volailles au plus grand nombre.
(Source : Itavi d’après, SSP, douanes et Kantar WP pour France Agrimer, Mapama, ANVOL)