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A la Bananeraie, c’est l’effervescence. Comme à chaque fois que Michel & Augustin, les trublions du goût, ouvrent leurs portes à leurs fans, une soirée par mois. D’ailleurs, la Bananeraie, en voilà un drôle de nom pour un siège social d’une entreprise agroalimentaire ! Et pourtant… Il faut dire que Michel & Augustin ne font jamais rien comme les autres. Là où les autres entreprises du secteur font preuve de professionnalisme et de rigueur dans leur communication, chez les trublions du goût on descend de Montmartre à ski, on rend hommage à Michael Jackson dans un rayon yaourts, on parodie Nespresso et, surtout, on ne se prend pas au sérieux. Et le pire, c’est que ça marche ! Les consommateurs en redemandent ! En 2010, les ventes de Michel & Augustin ont atteint 30 millions d’euros. Ils comptent également 33 000 fans sur leur page Facebook. Pas mal, d’autant plus lorsque l’on sait que ces deux entrepreneurs ne sont partis de rien, ou presque. Sauf qu’ils ont fait le choix d’une communication décalée, humoristique, légère et colorée, qui a su conquérir les consommateurs. Et aujourd’hui, ce sont Liebig et Fleury Michon, par exemple, qui s’en inspirent. Comment les trublions du goût ont-ils réussi leur pari ? Quel est ce nouveau type de marketing qui fait chavirer le cœur des français ? Quelles entreprises ont su l’utiliser à leur profit ?
Agro-media.fr décrypte pour vous cette nouvelle tendance marketing.
Michel & Augustin : une success-story à moindre coût.
Quand Michel & Augustin se lancent, ils ont beaucoup d’idées mais pas beaucoup de moyens. Augustin Paluel-Marmont raconte : « quand nous avons imaginé notre projet, nous étions encore de jeunes cadres dynamiques dans des grands groupes, convaincus qu’il y avait une place en France pour une marque gourmande et sympa ». Son copain, collègue et associé, Michel de Rovira, Augustin l’a rencontré en classe de quatrième, dans un collège parisien. Ensemble, ils veulent créer quelque chose de différent, quelque chose de « 100% vrai ». Ils élaborent des recettes de biscuits ensemble et vendent leurs premiers paquets à l’épicier en bas de leur quartier, au cœur de Paris. Six ans après, ils réalisent 30 millions d’euros de chiffre d’affaires.
Michel & Augustin ne font rien comme les autres : rien que le nom de leur marque, éponyme, interpelle. Leurs packagings colorés, débordant de dessins humoristiques et autres anecdotes croustillantes, font sourire tout en attirant le regard, de la même façon que leur emblème, la vache. Et surtout, ils interpellent notre âme d’enfant. Pourtant, les produits de la marque sont positionnés haut-de-gamme, plus chers que la moyenne. Et Michel & Augustin parvient à s’offrir une communication phénoménale sans débourser le moindre euro. Ainsi, les deux trublions du goût s’impliquent personnellement dans leur communication. Quand ils ne vendent pas eux-mêmes leurs produits dans les rayons frais, ils déambulent dans Paris déguisés en vache ou skient sur les marches de Montmartre. Ils misent sur un humour potache pour faire le buzz sur le web. Et ca marche ! Le 1er février 2007, au cours d’une conférence donnée par Bill Gates au Salon des Entrepreneurs qui a eu lieu au Palais des Congrès à Paris, ils parviennent même à déposer leurs yaourts à boire sur la tribune où Bill Gates s’exprimait. Ce dernier a ensuite été filmé en train de savourer leurs produits. Le buzz autour de cet évènement a été estimé à 100 000€ d’achats d’espaces publicitaires, que les deux trublions n’ont pas eu à débourser !
Pour les idées d’innovations et les tests sensoriels, ça se passe presque pareil : au cours des soirées organisées à la Bananeraie, les fans de Michel & Augustin se transforment en boîtes à idées et testeurs occasionnels. Les consommateurs adorent tester des produits et donner leur avis, et cela coûte bien moins cher aux deux comparses qu’une séance d’analyse sensorielle. Un pari gagnant-gagnant ! Et les perspectives ne manquent pas pour les deux amis : ouverture d’un bar à vaches à Paris et à New York, hôtel à leur nom, tee-shirts, glaces au yaourt… L’avenir de la marque à la vache et au bananier s’annonce radieux !
Un autre exemple de marketing alimentaire décalé : les smoothies Innocent.
Arrivée en France début 2005, la marque anglo-saxonne de smoothies Innocent illustre également cette nouvelle tendance marketing. En Grande-Bretagne, la marque a pris la tête du marché des smoothies en huit ans. Mais comment ? Jean-Pierre Mialon, le vice-président de Challenger House (Publicis Groupe), explique : « tout chez elle est publicité : le nom, le logo, le packaging. Rares sont les produits aussi cohérents dans le mix-marketing. » Même constat pour Sophie Romet, directrice générale de Dragon rouge, Innocent annonce une nouvelle manière de faire du marketing : « La marque mise sur la qualité, l’éthique, l’humain, l’engagement citoyen dans la lignée de Ben&Jerry’s ou de Stonyfield Farm. Elle est dans l’air du temps, innovante et disruptive. »
Innocent a en plus pu bénéficier de l’engouement autour des fruits et légumes afin de lutter contre l’obésité. « Notre produit est simple et honnête. Nous n’avons rien à cacher », déclare Matthew Gardandan, le directeur marketing d’Innocent France. L’idée est reprise sur l’ensemble de la communication : le nom, le logo représentant un visage ressemblant à un fruit auréolé, le blanc du packaging, les icônes et symboles…
Comme pour Michel & Augustin, l’histoire du projet et des trois fondateurs, Richard Reed, Adam Balon et Jon Wright, est décalée. Pour valider leur idée, ils racontent avoir proposé leur boisson dans un festival de jazz en interrogeant le public. « Devons-nous quitter nos jobs et créer notre entreprise pour produire des smoothies ? », avaient-ils inscrit sur des pancartes. Deux poubelles « oui » et « non » étaient placées sur le stand : celle du « oui » l’a emporté haut la main. Cette proximité dans la relation client a été largement cultivée par la marque qui multiplie les discours, les anecdotes et les blagues dans de petits textes apposés au dos des bouteilles ou reproduits sur des livrets, à l’instar de Michel & Augustin. Et là encore, c’est un succès…
Les pionniers du mouvement : Ben & Jerry’s.
Lorsque l’on demande à Michel & Augustin quelles ont été leurs inspirations, ils citent spontanément Ben & Jerry’s. Encore une histoire pas banale, une success-story qui rappelle les deux autres… Ben et Jerry se sont rencontrés sur les bancs de l’école en 1966. Leur point commun : la gourmandise ! Ils décident de se lancer en 1977 dans le secteur de la glace et investissent 5 € dans des cours par correspondance pour apprendre à en fabriquer. En 1978, Ils décident d’ouvrir leur propre boutique de glace. Ils gagnent une forte notoriété dans la région grâce à leurs glaces généreuses et gourmandes créées à base de bon lait de vache du Vermont et de gros morceaux. Les deux amis ont alors un objectif commun : s’amuser en travaillant et redonner une partie de leurs bénéfices à la communauté. Car Ben & Jerry’s est une marque résolument éthique, mais qui n’oublie pas d’être gourmande. Son design, à l’image de Michel et & Augustin et Innocent, est très simple, faisant appel à nos souvenirs d’enfance. A nouveau, la vache est choisie comme emblème. Les deux américains ont un leitmotiv : « faire la meilleure glace possible, de la meilleure manière possible ».
Pour résumer : la recette du succès
Plusieurs points sont communs à ces trois histoires de success-story marketing. Tout d’abord, c’est le charisme de leurs dirigeants, qui ont su s’impliquer dans leurs projets au-delà des limites traditionnelles, quitte à donner de leur personne. Ils sont parvenus à partager leur passion autour de leurs produits. Niveau graphismes, la recette est plutôt simple : dessins simplifiés, nous rappelant notre enfance, packagings colorés, clins d’oeils humoristiques et anecdotes en tous genres ont su égayer les consommateurs. Et elle marche à merveille ! Les consommateurs en redemandent. D’ailleurs, ces derniers sont fortement plébiscités dans ce nouveau type de relation clients qui affranchit les barrières.
Les dirigeants ne sont plus des PDG inaccessibles cachés au sommet de leur siège social, mais des personnes comme tout le monde ou presque, que l’on peut rencontrer facilement et avec qui l’on peut échanger. Les clients ont leur mot à dire et ils permettent aux marques d’évoluer tout en dépensant le moins possible. La communication, enfin, est insolite : pas d’affiches ou de spots publicitaires classiques, tout est décalé et l’objectif est de créer un véritable buzz sur internet à moindres frais.
En tout cas, Michel & Augustin, Innocent et Ben & Jerry’s sont tous trois parvenus à réaliser l’exploit de nous faire sourire en faisant nos courses, et ce malgré la crise ! Il est clair que ces trois marques ont encore de longues et belles années devant elles… V.D.