En raison de son faible coût, l’huile de palme est, de loin, l’huile végétale la plus consommée au monde avec plus de 48 millions de tonnes produites en 2010. Pourtant, de nombreuses études montrent la possibilité d’allier durabilité et intérêts commerciaux. Plusieurs entreprises ont d’ores et déjà pris l’initiative de renoncer à cette huile végétale riche en acides gras saturés.
Ingrédient traditionnel de la cuisine africaine, asiatique et sud-américaine, extraite par pression à chaud de la pulpe des fruits du palmier à huile, l’huile de palme est de plus en plus utilisée dans l’alimentation : céréales, margarine, crème glacée, biscuits, pains industriels, plats cuisinés… Or, elle contient des graisses saturées et notamment de grosses quantités d’acide palmitique (près de 60%), graisse athérogène qui favorise les dépôts graisseux à l’intérieur des vaisseaux sanguins et accélère la dégénérescence de leur paroi interne.
“Consommée en trop grande quantité, l’huile de palme peut augmenter le taux de cholestérol dans le sang et entraîner des risques cardiovasculaires car elle est très riche en acides gras saturés, plus que le saindoux !” explique le Docteur Laurent Chevallier, médecin nutritionniste, auteur du livre “Les 100 meilleurs aliments pour votre santé et la planète”.
De plus, l’huile de palme a des conséquences environnementales terribles. Les forêts des beaucoup de pays producteurs comme la Malaisie et l’Indonésie ont été détruites à plus de 90 % afin de laisser la place à des palmeraies. Conséquences directes, les émissions de gaz à effet de serre ont explosé pendant que l’habitat naturel de plusieurs espèces comme l’orang-outang est à présent menacé. Selon l’ONG Les Amis de la Terre, 5000 grands singes sont victimes chaque année de cette déforestation. Pour ces raisons, plusieurs entreprises ont décidé de bannir l’huile de palme de leurs produits.
« L’huile de palme est un ingrédient très décrié, à juste titre. Or de plus en plus, nos clients font des choix responsables tant en matière de santé que d’environnement », explique Alain Bizeul, directeur de la marque Casino. Fort de ce constat, le groupe de Jean-Charles Naouri n’a plus recours à l’huile de palme pour l’élaboration des 571 articles Casino au profit d’autres matières grasses comme l’huile de colza, de tournesol ou d’arachide, et sans augmentation des prix, puisque Casino compense en réduisant d’autres marges.
L’entreprise Findus a été récompensée par l’ONG WWF pour avoir également supprimé l’huile de palme de tous ses plats cuisinés. D’autres marques comme Unilever, Danone, Nestlé ou encore Premier Foods se sont, elles, engagées à acheter uniquement de l’huile de palme certifiée durable d’ici 2015. Des initiatives allant à l’encontre de la rentabilité économique ?
Non, répond le cabinet Vigeo, spécialisé dans la notation extra-financière, qui a publié l’hiver dernier un rapport sur le sujet. Renoncer à l’huile de palme ne fait ni augmenter les prix ni réduire la rentabilité économique, on l’a vu avec l’exemple de Casino, mais les auditeurs ajoutent que privilégier l’exploitation durable de l’huile de palme va également dans l’intérêt des grandes entreprises de l’agro-alimentaire produire ou acheter une huile durable minimise les conséquences commerciales néfastes liées à une réputation entachée. Les marchés peuvent en effet réagir très négativement à une mauvaise réputation.
Rentabilité économique, réputation améliorée, protection de l’environnement, les arguments sont nombreux afin de renoncer à l’huile de palme ou, au moins, privilégier une huile durable et certifiée. Alors, qu’attendent les autres industriels pour agir ?
Jean Tatouin