Dans le cadre de la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, la France s’est fixé comme objectifs de réduire sa consommation d’énergies fossiles de 40% d’ici à 2030, d’atteindre la neutralité carbone en 2050 et de diviser par six ses émissions de gaz à effet de serre à cette date. Concerné, le secteur agroalimentaire doit optimiser l’usage de ses ressources en améliorant sa performance énergétique et en optant pour des solutions durables.
Répondre aux enjeux du développement durable est aujourd’hui un des défis à relever pour l’industriel de l’agroalimentaire qui doit parallèlement veiller à assurer la sécurité alimentaire tout en optimisant sa production. Le choix des fluides et lubrifiants est donc une des étapes primordiales, sinon incontournables, tant au niveau technique, qu’économique et environnemental. Bien les choisir aujourd’hui, c’est déjà penser à demain ! Pour accompagner les industriels dans leur démarche de développement durable (souhaité par ailleurs par le consommateur), de sécurité alimentaire et d’optimisation de process, les fabricants mettent l’accent sur l’innovation en proposant des fluides plus durables et des lubrifiants plus sécurisants pour l’usine de demain.
Prendre la direction de l’industrie verte
Prendre la direction d’une industrie plus durable, c’est donc opter pour un fluide qui sera privilégié en fonction de sa conformité à la réglementation F-Gaz en Europe. Celle-ci impose désormais d’utiliser des fluides à très faible GWP. En effet, pour rappel, les HFC (HydroFluoroCarbures) avec un GWP > 1500 sont utilisables jusqu’en 2025. Et d’ici 2030, l’industriel peut encore utiliser les HFC avec un GWP > 150. Ainsi, à partir de 2030, le fluide frigorigène autorisé sur les installations frigorifiques par exemple, devra donc avoir un GWP inférieur à 150.
En adéquation avec les objectifs définis par la directive européenne F-Gas, l’accord de Paris et l’accord international de Kigali, Axima Réfrigération France a ainsi anticipé la disparition progressive des gaz HFC à effet de serre, en proposant des alternatives décarbonées «Ilico2». Les solutions Ilico2 d’Axima Réfrigération France, filiale d’Engie Solutions, ont pour but d’apporter des réponses écologiques et pérennes aux applications de réfrigération, quelle que soit la puissance ou la température, avec des fluides frigorigènes naturels (CO2, NH3, HC) et bas carbone (HFO). Ces alternatives réduisent ainsi l’impact carbone de vos installations. Elles peuvent être associées à différents fluides frigoporteurs (CO2, alcali, eau glycolée, eau glacée…) selon l’application et les performances souhaitées.
De son côté, l’expert Climalife propose parmi ses nombreux produits, trois solutions étroitement liées au développement durable pouvant bénéficier de la fiche CEE «Récupération de chaleur sur un groupe de production de froid» (Seuls les HFO purs (R-1234yf et R-1234ze) sont éligibles au dispositif de suramortissement qui prend fin en décembre 2023, dispositifs spécifiques à la France).
Récuperer de l’énergie gratuitement
Climalife propose ainsi le R-455A, la solution au plus faible GWP (<150) du marché, utilisée en réfrigération de 0 à -50°C avec une condensation possible jusqu’à +65°C/+80°C. L’expert propose également le R-1234yf, utilisé en réfrigération de +10 à -30°C avec des températures de condensation jusqu’à +85°C/+90°C et le R-1234ze, de +10 à -20°C, qui accepte jusqu’à +95°C/+105°C en température de condensation. Le fait de pouvoir condenser au-delà de +100°C, rend le fluide R-1234ze très intéressant pour la récupération de chaleur, car cette récupération d’énergie gratuite est très recherchée notamment en industrie agroalimentaire. Aujourd’hui, par exemple, des pompes à chaleur au R-1234ze réchauffent de « l’eau de process » de +50°C à +90°C ou plus. «L’eau dont la température est ainsi augmentée est utilisée dans un procédé industriel, ou peut être stockée pour un usage ultérieur ou encore injectée dans un réseau de chauffage urbain. Un principe qui permet des économies d’énergie conséquentes» explique Climalife.
De son côté, Daikin a lancé une nouvelle gamme de refroidisseurs fonctionnant au R-32. «Son faible potentiel de réchauffement planétaire, combiné à sa classification en gaz peu inflammable, sont tout autant d’atouts pour faire émerger son utilisation dans de très nombreuses applications. En plus d’être peu impactant sur l’environnement et manipulable en toute sécurité, le R-32 est également facilement recyclable et réutilisable», explique le producteur de réfrigérants. Le groupe poursuit la généralisation du R-32 dans l’équipement de ses produits, en réponse aux exigences de la règlementation internationale, européenne et française en matière de réfrigérants (F-Gas). Une nouvelle gamme de solutions Daikin équipée du réfrigérant pur R-32, au faible potentiel de réchauffement planétaire, est proposée pour le rafraîchissement d’application tertiaire.
Stimuler l’innovation pour développer les fluides de demain
Cette année, outre ses nombreux autres centres (au Danemark pour les décanteurs), à Aalborg (applications marines), à Nakskov (applications de filtration sur membrane), l’expert du transfert de chaleur, de la séparation centrifuge et de la gestion des fluides, Alfa Laval, a ouvert un centre d’application et d’innovation de pointe à Kolding, au Danemark pour le traitement des fluides. Le centre a pour but de renforcer le leadership technologique de la société dans le domaine de la manipulation des fluides et pour objectif stratégique d’accélérer l’innovation des produits. «Le centre offre un environnement unique pour développer les technologies et les équipements de traitement des fluides de demain. De multiples bancs d’essai dotés de matériel et de logiciels avancés nous permettent de stimuler l’innovation en menant des expériences de validation de principe rigoureuses sur de nouveaux équipements», déclare Rikke Kau Breinholt, vice-président, Manipulation des fluides hygiéniques et responsable de la recherche et du développement, Alfa Laval.
Réduire les coûts, sécuriser la production
Outre les fluides, la lubrification est un point important à prendre en considération pour le bon fonctionnement des installations. Bien choisir une solution de lubrification ou de graissage (et elles sont nombreuses), est tout aussi essentiel dans l’industrie agroalimentaire pour les performances des équipements tournants et la sécurité alimentaire. Lorsque plus de 40% des coûts de maintenance sont liés à une mauvaise lubrification, une gestion appropriée s’impose afin d’obtenir des performances optimales des applications et une durée de service maximum. L’utilisation de lubrifiants inappropriés, surtout dans l’agroalimentaire, peut en effet avoir des conséquences graves lors de la fabrication de différents produits alimentaires, autant pour le consommateur que pour l’industriel concerné. C’est pourquoi, afin d’accroitre la sécurité, de réduire les coûts de maintenance et d’améliorer la productivité, il est très important d’utiliser des lubrifiants dits «compatibles alimentaires» sur les sites de production afin d’éviter tout risque de contamination des produits ainsi que des coûts supplémentaires induits.
Nom de code : NSF ISO 21469
La norme ISO 21469 certifie les lubrifiants utilisés dans des industries spécialisées telles que la fabrication d’aliments. Les lubrifiants certifiés par NSF (fournit une évaluation indépendante par un tiers de la conformité d’un lubrifiant aux exigences d’hygiène définies par cette norme ISO) portent la marque officielle de certification NSF ISO 21469 sur leurs emballages et étiquettes.
Pour rappel, suite aux directives de l’Union Européenne qui appelle à un contrôle plus strict de la présence d’huiles minérales hydrocarbonées dans les aliments, les matières et articles amenés à être en contact avec les aliments, aucune trace d’huiles minérales telles que les composants MOSH (Mineral Oil Saturated Hydrocarbons/ hydrocarbures saturés d’huile minérale) et MOAH (Mineral Oil Aromatic Hydrocarbons/hydrocarbures aromatiques d’huile minérale) ne doit être détectée tout au long de votre process.
«Une des manières pour les lubrifiants d’intégrer la chaîne alimentaire est le process de production et autres aides au process, incluant ainsi les lubrifiants utilisés dans la production d’aliments et de leurs emballages», explique Klüber, fabricant de lubrifiants spéciaux. «L’un des avantages de notre méthodologie prouvée est le fait qu’une très faible quantité de lubrifiant est suffisante pour atteindre l’effet de lubrification souhaité, mais cela est le cas uniquement si le lubrifiant a parfaitement été sélectionné et si les opérations de lubrification sont gérées de manière adéquate» explique Alexandre Doria, Responsable du Marché Agroalimentaire pour Klüber Lubrication France. «Les limites de détection dépendent fortement de la distribution de MOSH et de type d’échantillon. Par exemple, dans les échantillons avec forte contenance en huile, la détection est limitée autour de 5 mg MOH/kg d’aliments, alors qu’avec un échantillon sec, des taux de 0.1 – 0.5 mg/kg sont observés», explique-t-il.
Réduire l’introduction de contaminants
Face au besoin croissant de réduire l’introduction de contaminants chimiques et physiques dans les environnements de transformation des aliments et des boissons, les fabricants recherchent aujourd’hui des lubrifiants conformes aux programmes de qualité, qui respectent les exigences HACCP et bien sûr plus respectueux de l’environnement.
Les lubrifiants de qualité alimentaire portent ainsi le logo NSF, des codes de catégorie NSF auxquels le lubrifiant est conforme ainsi que le numéro de certification NSF. Parmi les plus utilisés, le NSF- H1 est un lubrifiant pour contact accidentel. Seule une contamination de 10 ppm par un lubrifiant NSF-H1 est autorisée sur un aliment. Le NSF-H2 quant à lui ne permet aucune possibilité de contact alimentaire. Le NSF-H3 est valable pour les lubrifiants autorisés pour le contact direct avec les aliments.
Dans ce domaine, Climalife couvre l’ensemble des besoins en huiles frigorifiques quelles soient minérales, semi-synthétiques ou synthétiques, et distribue la marque CPI, qui propose des huiles et des lubrifiants enregistrés NSF H1 pour les applications où il existe un risque de contact accidentel avec les aliments, et des produits NSF H2 pour les applications sans possibilité de contact alimentaire. Un certain nombre de produits CPI sont également certifiés casher et halal.
Conçues pour l’industrie agroalimentaire et adaptées à de nombreuses applications, les huiles synthétiques Mobil SHC Cibus, enregistrées NSF H1, aident également à augmenter la productivité, réduire les coûts, assurer et maintenir un niveau élevé d’intégrité du produit et apporter aux équipements critiques une protection contre l’usure. «Les produits Mobil SHC Cibus par rapport à des huiles standards, proposent des économies d’énergie qui peuvent aller jusqu’à 3,6% dans les applications de type engrenages» explique le fabricant. Tout comme pour Climalife, ce dernier accompagne les métiers de l’agroalimentaire en proposant une démarche d’accompagnement destinée à améliorer et optimiser la lubrification de vos équipements en intégrant si besoin la sécurité alimentaire (démarche HACCP).
Des lubrifiants adaptés aux applications
La marque Rocol a quant à elle développé un nouveau lubrifiant Sec PTFE Foodlube (Dry PTFE Spray), pensé et certifié pour l’industrie agroalimentaire. Le Dry PTFE Spray est un lubrifiant PTFE sec non toxique et non tachant, idéal pour une utilisation dans des environnements où les lubrifiants humides ne peuvent pas être tolérés, par ex. environnements poussiéreux tels que les boulangeries. Le spray Dry PTFE peut être appliqué sur les pivots, les maillons, les axes et les poulies pour éviter l’usure et prolonger la durée de vie des composants. Il est également idéal pour une utilisation comme agent anti-adhérent sur les goulottes et les toboggans. Le film sec est composé d’un haut niveau de PTFE submicronique qui offre une protection légère mais très durable, offrant des intervalles de re-lubrification prolongés. Il est certifié NSF H1, ISO 21469 et Halal. SKF a élaboré une solution de lubrification sèche donnant l’opportunité de réduire la consommation d’eau tout en améliorant l’hygiène et la sécurité autour des convoyeurs. “Le but du système de lubrification sèche SKF est d’amener automatiquement et précisément la dose exacte de lubrifiant au point de frottement à partir d’une unité centrale qui peut alimenter jusqu’à 200 points de lubrification et ceci dans la continuité du processus de production”, explique SKF. Le lubrifiant à film sec compatible alimentaire SKF LDTS 1 de SKF a été quant à lui conçu spécialement pour la lubrification automatique des convoyeurs à chaîne à charnières en plastique dans l’industrie des boissons. Ce lubrifiant est composé d’huile synthétique et renforcé avec un lubrifiant solide PTFE. A noter que les systèmes de lubrification automatique doivent comporter un mécanisme d’agitation, tel que le système de lubrification sèche SKF.
Molydal, expert en lubrifiants industriels et solutions met en avant, entre autres, une huile végétale pour contact alimentaire garantie sans MOSH, sans MOAH et sans POSH. Ce lubrifiant dit «propre et polyvalent» est préconisé pour des opérations de lubrification, de découpage ou d’emboutissage léger dans tous domaines d’activités spécifiquement dans les industries alimentaires et agroalimentaires. Il est ainsi garanti sans silicone, sans allergènes (réglementation UE 1169/2011) et sans OGM. Homologué pour l’industrie alimentaire, par le NSF (National Sanitation Foundation) dans les catégories 3H, H1, pour éviter l’adhérence des denrées alimentaires sur les équipements de fabrication. H VG contient 100% de contenu biosourcé certifié USDA. «Le produit est idéalement préconisé pour toutes opérations de déformations à froid des métaux, boîtes de conserves, capsules, couvercles et tous types d’emballage métallique, lubrification de tapis et de chaînes de transfert des aliments» explique Molydal.
Vers les lubrifiants du futur
«Le lubrifiant du futur devra répondre à des exigences encore inconnues à ce jour» affirme Michaela Wiesböck, Group Leader au service Recherche et Développement produit de Klüber Lubrication. «Compte tenu des exigences de plus en plus strictes en termes de performances de lubrifiants, l’efficacité énergétique et l’éco-compatibilité d’un côté et la fin des matières premières fossiles de l’autre, la demande en concepts de lubrification innovants entièrement à base de matières premières renouvelables est déjà clairement visible», explique Michaela Wiesböck.
Le fabricant Klüber Lubrication a ainsi développé des lubrifiants spéciaux, des lubrifiants homogènes contenant de l’eau comme composant fonctionnel appelés désormais les Hydro-Lubricants. Comparée aux lubrifiants à base d’huile actuels, l’eau offre de nombreux avantages opérationnels : elle est durable, disponible partout dans le monde, non-toxique et ininflammable. Comme lubrifiant, elle était jusqu’ici limitée en termes d’utilisation étant donné que l’eau est soumises à certaines limites physiques et biologiques, comme les points d’évaporation et de congélation, l’oxydation ou le développement microbiologique. Cependant, aux moyens d’additifs dans le lubrifiant ou de solution techniques sur le composant concerné, ces limites ont été contournées et les effets spécifiques de l’eau rendus véritablement utilisables. «Avec un concept de produit à base d’eau, nous avons même été capables de réduire le frottement généré à un taux exceptionnellement bas au point de rendre le taux de «superlubricity» facilement atteignable» » explique Stefan Seemeyer, Responsable Recherche et Développement produit chez Klüber Lubrication. De la même façon, l’eau évaporée peut être retenue dans le circuit à l’intérieur d’un composant fermé, et peut même être utilisée à des fins de refroidissement. Une autre ligne d’approche est de rendre utilisable les propriétés évidentes de l’eau comme la conductivité électrique ou les effets refroidissants.
Cette technologie Hydro Lubrication est d’ores-et-déjà utilisée dans la gamme Klüberplus C 2. Dans ces lubrifiants, conçus pour les convoyeurs à palettes, sont utilisés de l’eau et des huiles solubles dans l’eau, permettant un dosage plus précis du lubrifiant et ainsi la réduction des incidences des défaillances dans les opérations de production. Klüber l’affirme, ses lubrifiants réduisent les émissions de CO2, économisent les ressources naturelles, montrent une meilleure compatibilité environnementale, minimisent les coûts d’élimination et de recyclage, prolongent la durée de vie des machines en réduisant la résistance aux frottements et diminuent les coûts d’exploitation et la consommation d’énergie. Mais, estime Klüber Lubrication, tout le potentiel de la technologie d’Hydro Lubrication reste encore à explorer.