Mettre en lumière les innovations les plus marquantes du secteur, tel est l’objectif des Sitevi Innovation Awards. Parmi les 77 dossiers reçus, 19 produits et services ont été récompensés par le jury (2 médailles d’Or, 5 médailles d’Argent et 12 médailles de bronze). Ils illustrent les tendances majeures du salon qui a lieu actuellement à Montpellier, à savoir : le numérique et ses applications, la réduction de l’usage des produits chimiques et la différenciation commerciale.
Ces innovations concernent à la fois le secteur de la viticulture, de l’arboriculture et du maraichage, et celui de l’œnologie et de l’emballage. Un palmarès très diversifié au niveau des applications et des domaines couverts, dans lequel 3 grandes tendances se dessinent : La première concerne encore cette année le numérique et ses applications. Le numérique est maintenant présent de façon très importante dans les machines, et beaucoup d’innovations ne pourraient pas exister sans ses apports. La deuxième tendance porte sur la protection sanitaire des cultures et du vin, avec la réduction voire la suppression de l’usage de produits chimiques. Cela passe à la fois par l’amélioration des techniques existantes, en particulier sur les pulvérisateurs, et également par le développement de solutions alternatives à l’usage des produits phytos. Une dernière tendance s’apparente à un besoin de différenciation commerciale, besoin couvert par des outils innovants d’emballage et de présentation ou une nouvelle variété.
Le numérique et la robotique viticole
Le numérique permet de faciliter la tâche des chauffeurs comme celle des responsables de chai pour le pilotage des équipements. Il permet également d’avoir plus d’informations pertinentes pour prendre les bonnes décisions, de garder en mémoire ces actions/résultats obtenus, et de les partager ensuite facilement.
Depuis de nombreuses années le numérique est présent à bord des machines agricoles. Même si l’électronique embarquée était plus présente que le numérique, cette présence à bord des machines a permis d’amener de nouvelles fonctions et en particulier des aides à la conduite pour le chauffeur. Le développement le plus abouti du numérique concerne la robotique actuellement en phase d’essor, avec des robots viticoles comme le robot bakus (Vitibot).
Il est probable que dans peu d’années cette offre commerciale s’étoffe en matière de robots, notamment au niveau des fonctions et des performances. Cependant, sur la machine où le chauffeur est toujours présent, les innovations numériques aideront ce dernier à piloter une machine de plus en plus sophistiquée et performante. Afin d’augmenter le débit de chantier lors de l’utilisation des porteurs enjambeurs, les utilisateurs souhaitent pouvoir combiner plusieurs outils.
Le tracteur «Frutteto CVT Activesteer» de sDF (médaille de bronze) est équipé d’un système de direction sur les 4 roues qui permet des combinaisons de marche : inversé, inversé retardé, crabe. De nombreuses aides à la conduite rendent ce tracteur efficace et simple à conduire. en particulier, le mode automatique qui gère les opérations lors des demi-tours, avec possibilité d’enregistrer des séquences d’opérations.
Des outils d’aide à la conduite pour diminuer la pénibilité des opérations lors des demi-tours, ou des dispositifs pour limiter le nombre de tours de volant (Customsteertm de New Holland) voire pour les supprimer (Click-turn de GRV) voient le jour. Il y a de plus en plus d’outils de visualisation et de pilotage des équipements qui fournissent des indications très élaborées à l’utilisateur sur le process en cours, sous forme de graphiques et de courbes.
Rendre les outils de toutes marques interopérables
Le e-panel de Diemme enologia et la smart Graph de pera-pellenc sont des interfaces utilisateurs qui viennent aider l’utilisateur dans ses tâches de pilotage d’opérations œnologiques.
La possibilité de combiner des outils sur un porteur est limitée par la compatibilité entre les outils et le porteur : si les outils sont fabriqués par un autre constructeur que le constructeur du porteur, les possibilités de pilotage facilité et/ ou d’automatisation sont quasi-nulles. La norme Isobus a été développée pour répondre à ce problème, cependant elle tarde à se développer sur les tracteurs et machines viticoles et arboricoles, et elle ne s’appliquera peut-être jamais sur des outils sans électronique associée (tondeuse, outil de travail du sol…).
Le numérique pour le pilotage des équipements fixes
Le numérique c’est aussi la possibilité d’automatiser des process et/ou des équipements et de fournir ainsi des fonctions totalement inédites. C’est ainsi que Sun’Agri (médaille d’Or) propose un système « d’Agrivoltaïsme », c’est- à-dire une installation qui combine protection des cultures, contre les aléas climatiques de plus en plus sévères, et production d’électricité. Des panneaux photovoltaïques sont installés au-dessus de la culture (vigne, verger, serre…), et ont pour mission de protéger la culture sans nuire à sa productivité. Selon les circonstances, l’orientation des panneaux va favoriser l’ensoleillement de la culture ou, au contraire, son ombrage partiel. Le numérique permet ici de piloter la position des panneaux de façon à optimiser le rendement de la culture. La production électrique est un sous-produit de l’activité agricole et ne vient pas la remplacer.
Toujours dans le domaine du pilotage des équipements, le numérique accroit sa présence dans la cave. On obtient maintenant l’automatisation totale de certaines opérations comme le pressurage, le process de production des vins pétillants. Ainsi Bucher-Vaslin propose son pressoir pneumatique Maestro entièrement automatisé (médaille de bronze), où toutes les phases du cycle de pressurage sont pilotées automatiquement à partir de la mesure du poids de vendange et du volume de jus extrait lors du pressurage.
L’entreprise Parsec a mis au point un système de régulation informatisée AphroMate Plus (médaille d’Argent) qui automatise et gère complètement le process de production de vins pétillants et mousseux selon la méthode Charmat-Martinotti.
Aquadoc avec son système Andromède (médaille de bronze) offre la possibilité à des groupes d’irrigants (CUmA, AsA…) de pratiquer une irrigation connectée, partagée et optimisée. Des capteurs connectés permettent de connaitre en permanence les consommations d’eau par parcelle, et le logiciel qui reçoit les demandes des adhérents de la structure (AsA ou autre) gère l’allocation des demandes et l’ouverture des vannes de distribution de façon à ce que la répartition de l’eau soit équitable entre les adhérents et conforme aux disponibilités de la ressource. Ce système optimise l’irrigation et permet de préserver la ressource en eau.
Collecter les données et prendre les décisions
Le numérique permet également la collecte, le partage et l’analyse de données, de plus en plus nombreuses et essentielles à la prise des bonnes décisions.
Cette tendance à la collecte de données est portée par d’autres exposants, aussi bien pour la vigne (capteur sentinelle de sCDC ou Leafcrop de sencrop) qu’au chai (capteurs Winegrid de Watgrid).
D’autres applications sur smartphone sont proposées aux producteurs, et peuvent être une aide précieuse dans la prise de décisions car elles apportent des informations utiles et faciles d’usage à tout moment, comme l’application gratuite ApeX Vigne de l’IFV qui facilite l’utilisation de la méthode Apex pour l’estimation du niveau de contrainte hydrique de la vigne.
Réduire l’usage des produits chimiques
Dans le contexte actuel, il devient difficile d’utiliser des produits chimiques, aussi bien dans les parcelles que dans les chais. Les exposants du Sitevi développent des solutions innovantes afin d’améliorer les techniques existantes et/ou proposent des alternatives quand cela est possible.
À l’interface entre cette tendance et la précé- dente, on trouve le système expert DeciTrait de l’IFV (médaille de bronze). Decitrait propose au viticulteur une stratégie de protection phytosanitaire personnalisée basée sur les données et connaissances expertes disponibles complétées en temps réel par des données de capteurs météo. Grâce à son interopérabilité avec les systèmes externes, cet OAD (outil d’aide à la décision) indique la date du prochain traitement avec des doses réduites de 30 à 50% tout en sécurisant la récolte. L’historique des traitements est mémorisé, ce qui fiabilise en outre la traçabilité.
Le LabelPulvé (médaille d’Argent) proposé par l’IFV, avec le concours d’un comité d’acteurs publics et professionnels, est un outil d’amélioration des performances des pulvérisateurs. C’est un processus volontaire inédit de labellisation des pulvérisateurs viticoles selon la qualité de pulvérisation et l’aptitude à réduire les volumes pulvérisés à plusieurs stades végétatifs. Une vignette nominative (notes A+, A, b, ou C) est délivrée ainsi qu’un QR code d’accès aux conditions d’obtention.
L’entreprise Michael Paetzold a construit une unité d’oxygénation contrôlée des moûts (médaille de bronze) destinée au traitement des moûts en phase pré-fermentaire. Sa fonction consiste à combiner une dose déterminée d’oxygène au moût afin d’éliminer les composés nuisibles au bon vieillissement du vin. Ce matériel est également utilisable pour les travaux de chai toute l’année (ajouts de produits, homogénéisation, etc.). Avec ce système, l’opérateur peut optimiser aussi l’apport d’intrants et notamment diminuer l’utilisation de sO2.
Le pressoir Smart Press de pera-pellenc (médaille de bronze) est un véritable outil œnologique. L’injection d’intrants œnologiques durant le pressurage a été revue pour injecter d’autres solutions que le sO2, notamment des protéines végétales. L’objectif est de traiter les jus dès leur sortie des cellules des baies de raisin, pour prévenir des oxydations. Le système peut aussi injecter une solution d’enzymes au cœur de la vendange, notamment lors d’une macération enzymatique post flash détente des rouges.
La tendance est aussi à la substitution des produits chimiques par des produits plus neutres et moins impactants pour la santé ou l’environnement.
De façon générale, on voit apparaitre une tendance au développement de produits de biocontrôle, comme le Vitisan d’Andermatt, et le développement de méthodes physiques alternatives pour assurer la protection antifongique ou la désinfection comme l’usage des UV (Helios 2 DR de UV bOOstING), de la lumière pulsée (INstAN LIGHt de sORmAF), …
La différenciation commerciale, une nouvelle tendance
C’est une tendance qui existe de façon marginale depuis quelques années mais qui ne se dément pas. Cette différenciation vise un meilleur positionnement des produits, de leur prix et de leur image face à la concurrence, ou pour la conquête de nouveaux marchés.
La société Inessens propose son système de lentille de Fresnel (médaille d’Argent) qui donne un côté très attrayant aux étiquettes de bouteilles, tout en favorisant la lutte contre la contrefaçon. Cette «Lentille de Fresnel» est un décor sous forme d’un dôme transparent doté d’effets lenticulaires, esthétiques et de profondeur. La Lentille de Fresnel est déposée à chaud sur des étiquettes. Elle confère originalité et sophistication à un coût réduit et contribue ainsi à une différenciation exceptionnelle des bouteilles sur les linéaires.
La poire CH201 C.O.V. proposée par Dalival (médaille de bronze) est une nouvelle variété de poire bicolore, bien identifiable par le consommateur, qui s’inscrit dans un schéma de distribution sélective sous la marque Fred, schéma différent de l’univers dominant. Face à une offre assez «figée» depuis plusieurs années, cette poire bicolore, croquante et juteuse apporte une nouvelle dynamique d’innovation variétale et d’offre produit en associant production précoce et régulière, conduite facile et bon comportement face au feu bactérien.