La nouvelle réglementation en matière d’étiquetage expliquée dans notre interview exclusive.
Un règlement européen en matière d’étiquetage des produits alimentaires a été validé par le Parlement européen le 6 juillet 2011 avant d’être publié le 22 novembre 2011. Que contient ce texte ? Concrètement, qu’est-ce qui change pour les industriels ? Quel est le délai de mise en conformité ?
Un règlement européen en matière d’étiquetage des produits alimentaires a été validé par le Parlement européen le 6 juillet 2011 avant d’être publié le 22 novembre 2011. Que contient ce texte ? Concrètement, qu’est-ce qui change pour les industriels ? Quel est le délai de mise en conformité ?
Agro-media.fr a interviewé pour vous Me Maxime Baudouin, avocat d’affaires international spécialisé dans le droit alimentaire travaillant au sein du cabinet Gide Loyrette Nouel. Il répond à toutes ces questions :
Pourriez-vous brièvement vous présenter et nous parler de votre cabinet ?
Je travaille pour le cabinet Gide Loyrette Nouel. Personnellement, je suis à Bruxelles, sachant que le cabinet est basé à Paris mais possède plusieurs bureaux dans le monde. A Bruxelles, le bureau a ouvert dans les années 1960 et s’occupe principalement du droit de la concurrence, du droit du commerce international et de ce que l’on appelle les affaires réglementaires européennes, dans lesquelles il y a notamment le droit agroalimentaire. C’est dans ce cadre-là que nous avons une pratique assez développée de tout ce qui touche à la réglementation alimentaire.
Sommes-nous enfin arrivés à un texte précis sur l’étiquetage nutritionnel européen ?
Oui, tout à fait. C’est un texte qui a été longuement débattu, comme vous avez du le suivre, mais qui a finalement abouti en 2011 avec l’adoption définitive du règlement qui a été publié le 22 novembre.
Dans le détail, que devront précisément contenir les nouvelles étiquettes nutritionnelles ?
L’une des grandes innovations est de rendre obligatoire la déclaration nutritionnelle alors que jusqu’à maintenant son usage était volontaire. De nombreuses entreprises avaient tout de même déjà une étiquette nutritionnelle, mais maintenant, à partir du 13 décembre 2016, elle sera obligatoire. Le règlement fixe une période de transition assez longue pour permettre aux entreprises de s’adapter. Concrètement, il y aura des éléments qui devront obligatoirement figurer sur l’étiquette, à savoir :
- la valeur énergétique,
- la quantité de graisses,
- la quantité d’acides gras saturés,
- de glucides,
- de sucres,
- de protéines
- et de sel.
Puis les industriels pourront ajouter des éléments optionnels parmi une liste fixée par le règlement.
A part l’étiquetage nutritionnel, que peut-on trouver d’autre dans ce texte ?
Il y a beaucoup de choses. Il s’agit tout de même d’une évolution importante de la législation européenne, il s’agit d’une refonte de plusieurs textes. Les principaux points, qui représentent aussi les principales contraintes pour les entreprises, sont :
- La lisibilité des étiquettes : le règlement a fixé une taille minimale de caractères pour les informations obligatoires que doivent faire figurer toutes les entreprises agroalimentaires. La taille a été fixée à 1,2 mm de hauteur. Il s’agit d’un compromis, mais qui entraînera tout de même des coûts importants pour les entreprises car il y aura un gros travail non seulement pour se mettre en conformité avec la taille minimale mais aussi et surtout pour avoir une véritable stratégie afin de prioriser les informations que l’on va mettre. Il y a quelques exceptions selon les tailles de l’emballage.
- Les allergènes : le règlement reprend le système de l’étiquetage obligatoire des grandes catégories d’allergènes (il y en a 14), que l’on appelle les allergènes à déclaration obligatoire, pour que les consommateurs soient bien informés, et notamment les consommateurs allergiques. Les allergènes doivent figurer dans la liste des ingrédients. Ce qui change, c’est qu’ils doivent être mis en évidence par une impression qui les distingue clairement des autres ingrédients. Il y a un peu de flou autour de cela car beaucoup de pratiques s’étaient développées ces dernières années comme les mentions « contient » ou « peut contenir des traces de… », ou encore « a été fabriqué dans un atelier contenant… », etc. Il faudra suivre si la Commission européenne fait des interprétations de cette disposition pour l’expliquer un peu mieux, car c’est un point important qui concerne aussi la sécurité des consommateurs.
Un autre point important sur les allergènes, c’est que l’obligation d’informer le consommateur sur les allergènes va être étendue aux denrées non préemballées. Une denrée non préemballée, c’est tout simplement un aliment qui n’a pas d’emballage, comme les aliments servis dans les restaurants, les cafés, dans toutes les entreprises de restauration… Ce point faisait peur car il implique pas mal de contraintes. Cela implique aussi de se demander comment communiquer car forcément on ne va pas mettre d’étiquette sur un steak, etc. Cela passera par des affichages, ou alors des communications à la demande par exemple, ce que certaines chaînes ont déjà commencé à faire. - L’indication du pays d’origine pour les viandes : l’indication obligatoire du pays d’origine ou du lieu de provenance était déjà en vigueur pour certains produits, notamment le bœuf. Il est étendu à 4 catégories de viandes : la viande de porc, la viande d’ovin et de caprin, et la volaille. L’application effective de cette disposition sera subordonnée à des actes ultérieurs. L’indication obligatoire du pays d’origine concerne pour l’instant les viandes en tant que telles, qu’elles soient fraîches, réfrigérées ou congelées, mais pas la viande en tant qu’ingrédient dans des plats préparés. Il faut savoir que dans le règlement, il est indiqué que la Commission devra se pencher sur la question et regarder assez précisément si l’on peut étendre cette obligation d’indication de l’origine à la viande comme ingrédient dans des plats préparés et dans le futur à d’autres produits.
Y aura-t-il des étapes successives dans l’application du règlement, en termes de dates ?
La date principale est le 13 décembre 2014. L’application générale du règlement aura lieu à cette date. Les denrées qui sont mises sur le marché ou qui sont étiquetées avant le 13 décembre 2014 et qui ne sont pas conformes pourront être commercialisées jusqu’à épuisement des stocks. Cela laisse tout de même une marge de manœuvre à l’industrie, afin qu’elle puisse planifier les applications du règlement, qui seront quand même assez lourdes et voir comment faire au mieux.
La 2ème date importante à retenir c’est celle concernant la déclaration nutritionnelle obligatoire. On a considéré que cela demandait un peu plus de temps, donc c’est le 13 décembre 2016. Si entre 2014 et 2016 les entreprises veulent quand même faire une déclaration nutritionnelle, c’est possible, mais il faudra que la déclaration soit conforme aux dispositions du règlement. Il est aussi possible de le faire avant, évidemment, mais il faudra que la déclaration soit conforme aux dispositions actuellement en vigueur et au règlement.
Toutes les entreprises agroalimentaires sont-elles concernées par cette nouvelle règlementation ?
La plupart des entreprises sont concernées, mais il faut savoir qu’il y a déjà beaucoup de textes spécifiques qui s’appliquent pour des produits bien déterminés. Le principe qui s’applique de façon générale en droit, c’est que les dispositions les plus spécifiques s’appliquent en priorité par rapport aux dispositions générales. Si en revanche il n’y a pas de disposition spécifique, ce sera le règlement général sur l’étiquetage qui s’appliquera. Par exemple, les eaux minérales naturelles ou les compléments alimentaires sont déjà soumis à des dispositions spécifiques, notamment en matière d’étiquetage nutritionnel.
Suite à la validation du texte le 6 juillet 2011, l’Ania s’est inquiétée du coût que cela représentera pour les industriels. Concrètement, avez-vous une idée de ce coût ? L’Ania évoquait une menace pour la pérennité des PME, qu’en pensez-vous ?
C’est vrai que sur un certain nombre de dispositions cela va impliquer des coûts importants, notamment pour les PME. Le règlement impose des obligations à tous, sans distinction de taille d’entreprise. Il y a quelques aménagements mais effectivement ce que disait l’Ania était juste, notamment en ce qui concerne la taille minimale des caractères et l’étiquetage nutritionnel. Certaines entreprises qui n’ont pas forcément les ressources en interne qui leur permet de rationnaliser les changements d’étiquettes ou d’avoir une logistique très développée à ce niveau-là, vont devoir, en effet, faire des efforts.
Pensez-vous qu’il y aura dans quelques années un affichage environnemental obligatoire sur les étiquettes ?
Au niveau européen, cela pourrait être la logique, pour toujours plus d’harmonisation européenne. Par ailleurs, actuellement, il y a des initiatives dans les Etats-membres. Donc forcément, à un moment donné, on se pose la question de savoir si plusieurs législations nationales qui sont différentes ne sont pas un frein pour les échanges. Généralement, dans ces cas-là, on fait une législation européenne. La Commission a justement fait réaliser une étude de faisabilité sur l’établissement de critères de performance environnementale dans le cadre de la réglementation Ecolabel, ce processus est en cours. Mais ce n’est pas dans le cadre du règlement étiquetage. Plus généralement, il est vrai que cela va poser des questions car paradoxalement la législation impose de plus en plus d’informations écrites, de plus en plus grand, ce qui laisse de moins en moins de place pour le reste. On peut toujours essayer de donner toujours plus d’informations, y compris sur l’impact environnemental d’un produit alimentaire mais au bout d’un moment l’exercice pourrait atteindre ses limites.
Agro-media.fr remercie M. Maxime BAUDOUIN pour avoir répondu à nos questions.
Propos recueillis par Vanessa Dufus.
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